Une fois n'est pas coutume, j'ai décidé d'inaugurer une nouvelle rubrique: Un feuilleton blog roman en temps réel! Histoire de sortir du sempiternel journal de bord où je raconte ma vie ou mes coups de gueule, ce qu'entre nous, je fais déjà assez souvent sur scène. Donc installez vous confortablement, détendez vous et dégustez le 1er épisode de l'étrange vie de LUCIEN KERNIST!
*********************************************************************** MAIS FAITES LE TAIRE! On clone des brebis, on regreffe des membres disparus, on collecte des acariens fossilisés sur Mars; et on est pas fichu d'inventer des réveils en douceur.
La tête enfouie dans mon oreiller, le cerveau en veille, je maudis ce sévice que je m'inflige à moi-même. -6 heures et demie plus tôt, je me vois, au seuil du sommeil et à la frontière de la paranoïa, m'assurant que cette mécanique infernale ne me fera pas défaut 6 heures et demie plus tard- Au fond on devrait tous applaudir à l'exécution d'un plan qui se déroule sans accrocs...Mais non! Ingrat public que celui qui se réveille.
Après quelques secondes, mirage d'éternité, j'extirpe difficilement mon bras de l'enchevêtrement de couvertures sous lequel je me ressource en période de grand froid. Mes doigts, éclaireurs aveugles, tâtonnent dans l'obscurité jusqu'à ce qu'ils trouvent l'objet de leur campagne: le bouton OFF.
Il est dès lors tentant de ne pas être à la hauteur de la confiance que l'on a placé en soi même, la veille au soir. De succomber de nouveau à l'étreinte de ce si séduisant Morphée...Mais ce matin, ça ne sera pas le cas; on m'attend.
Je me dresse dans mon lit, le visage imprimé des gros titres de la nuit: des marques de drap, des marques de drap et toujours des marques de drap. Je prends contact avec le sol, Oh que c'est froid! Tiens! Je me lève? Ah oui c'est vrai, mon corps connaît le chemin.
Après de menus impératifs biologique que mon élégance naturelle préfère garder sous silence, j'allume la radio, remplit ma bouilloire électrique, la pose sur son socle, attend et inspire...
Du poste me parvient l'agressive voix du "France-interien" Nicolas Demorand, essayant vainement de soutirer une information intelligente du non moins agaçant, Patrick Devedjan.
Il me vient alors à l'esprit cet aphorisme dont l'auteur m'échappe: Les singes ne construisent pas de cathédrales.
Je souris. La bouilloire se rappelle à mon bon souvenir par un bruit sec; l'eau est chaude et demande à être mélangée à du café. Fort le café, s'il vous plait.
Une tasse à la main, j'erre dans mon studio de 18 m2 à la recherche d'un élément solide, aliment de base du français moyen: du pain! Mais voilà, chaque matin je dois faire face à ce terrible constat, le pain me fuit.
C'est pathologique, je suis victime du lobby des boulangères. Jamais ouvertes quand j'ai besoin d'elles. Obligé de me rabattre sur ce pain rassis que vend, trop cher! l'arabe du coin toujours disponible celui là, pour me soulager de mes maigres émoluments. Et j'insiste, ça n'est pas parce qu'on a donné un nom suédois fleuri à cet ersatz de bricheton, que cela en fait autre chose que du pain rassis!
Une fois "rassisié" donc, vient le rituel de la toilette quotidienne. Je file dans ma salle de bain qu'un architecte facétieux a voulu plus spacieuse que ma salle à vivre, et me retrouve face à face avec moi même
Dans le miroir, Lucien Kernist, 31 ans, célibataire, intérimaire faute de mieux, précaire faute de goût et, je ne le sais pas encore, futur mort...
Dans 45 minutes en effet, au carrefour du Faubourg Saint Antoine et de la rue de Charenton, je vais me faire renverser en vélib' par un 4*4 qui m'auras refusé la priorité. Je vais mourir sur le coup, et sur la route.
On m'aurait prédit cela à l'heure où devant ma glace, je contemple mes traits déformés par l'exercice rigoureux du brossage de dents, j'aurais été dans le déni: ça ne pouvait pas se finir comme ça!
Et pour une rare fois, j'aurais eu raison....
A SUIVRE...
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